Article d'Henri Derepas
Texte et photos Henri Derepas.
Génèse
Amateur de grands Dioramas au 1/72, je me suis mis en tête d’en réaliser un nouveau sur le thème de l’exode et de la bataille de France, en le situant aux premiers jours de l’attaque éclair de la Wehrmacht (deuxième quinzaine de mai), sachant qu’ainsi, je pourrai représenter dans le décor pêle-mêle sujets civils et militaires se croisant sur les routes embouteillées.
Je me suis donc mis en quête de kits cohérents que j’ai pu glaner notamment auprès
d’excellents créateurs de 3D, mais aussi en puisant dans mes stocks, notamment ceux de cet
ancien fabricant/résine que certains connaissent certainement : Alby.
Ce dernier a réalisé toute une gamme de véhicules militaires Français du réarmement
antérieurs ou contemporains à 1940
Bien entendu, je ne possédais pas toute la gamme et comme il se doit, il y a toujours
« le kit » qu’il vous manque, mais que vous rêvez d’incorporer dans votre scène !!!
C’est la découverte d’une ancienne et magnifique réalisation d’un autocar Isobloc qui a
déclenché mon envie d’en faire figurer un.
Isobloc W240 F2
Production Alby 1/72ème
Je vous passe les détails de mes recherches, mais j’ai fini par retrouver le fabricant qui distribue encore quelques sets sur eBay et qui peut
éventuellement produire des mini-séries.
Malheureusement le moule de l’Isobloc est…… définitivement foutu !!!!!
Alors, j'ai cherché, cherché à nouveau et j’ai découvert qu’un autre producteur de kit en
résine, contemporain, celui-là en avait un dans sa gamme, elle aussi, originale : Triumph Des
Willens (cela doit vous parler aussi, mais pour d’autres raisons).
Isobloc
Triumph Des Willens.
Je le contacte personnellement, très aimable, il me dit aussi qu’il produit en miniséries et que, hélas, ce modèle ne serait pas reproduit…… avant « moyen » terme…… Mauvaise pioche à nouveau !
Là, j'avais perdu espoir, quand, au hasard de mes recherches sur la toile, m’apparait
l’existence d’un bon vieux modèle de mon enfance… Un Dinky Toys !
Et là, je me suis rappelé qu’en dehors de leur 1/43e, que la marque produisait une
série qui me semblait proche de mon échelle de prédilection. Je vérifie, Bingo du 1/72 !!
Ne restait plus qu’en dégoter un, et là une offre à foison.
. Puisque la marque Atlas a racheté la licence correspondante ! J’en achète un aussitôt (pas cher sur le
Bon coin) avec le certificat d’authenticité en prime après avoir fait vérifier les côtes par mon
vendeur. Disposant des mesures du bus à l’échelle 1 il était facile de contrôler la bonne adéquation de l’échelle 1/72, puis de placer l’autobus à côté de véhicules montés à la même échelle.
Comparaison d'échelles.
Bienvenue au royaume de la conversion !
Car il faut que je vous dise, les conversions au 72, c'est ma passion. C’est ce qui fait
aussi que je peux développer des propositions originales dans mes scènes… cela commence
bien entendu, par les figurines (peut-être l’objet d’un nouvel article ?) , toutes uniques, même
dans des dioramas à plus de 300 personnages !
Conversions de figurines.
Alors ce bus-là, c’était un nouveau défi, car je vous laisse imaginer la simplicité extrême de l’objet, métallique de surcroit ! (Toutefois un fer blanc facile à travailler)
Je me propose donc de vous détailler dans le présent article les opérations de
conversion étape par étape, photos à l’appui. Bonne lecture !
Étape par étape
A) EXTERIEUR : Recréer une bonne base, car si le modèle est ultra-simpliste, il est par ailleurs décalé, représentant un autobus post
Seconde Guerre mondiale, avec une (très vilaine) galerie et son échelle d’accès à l’arrière (toutes deux absentes sur les photos d’époque), peinture non adaptée, roues non conformes (usage «
jouet »), etc.…
- Après un inventaire des tâches à réaliser, car avant toute chose, il faut mettre en
place un plan d’action, je commence par désolidariser à l’aide d’une meule montée sur ma mini perceuse, l’embase du corps supérieur.
- Puis je déclipse aisément l’échelle d’accès au toit
Échelle d'accès au toit.
- Je m’attaque ensuite au retrait de la galerie moulée.
Retrait de l'échelle clipsée.
Travail effectué d'abord, au touret à meuler, puis à la lime à métaux en prenant bien soin de protéger la carrosserie des mors de l’étau dans un linge, enfin la finition se fera à la toile émeri en commençant par un grain 150, puis de plus en plus fin, sachant cependant que l’opération sera poursuivie par la suite (après bouchage du méplat du toit) par un nouveau ponçage et le passage d'une couche d'apprêt.
- À ce stade, j’en profite pour m’attaquer au décapage de l’ensemble du corps supérieur. Connaissant le peu d’efficacité sur ce type de peinture hyper résistante en plus du risque de détérioration du métal par l’emploi de produits décapants, je préfère utiliser le décapeur thermique associé à chaud à l’emploi de diverses brosses montées sur ma perceuse, ces dernières me permettant d’épouser les quelques reliefs du bus que je me dois de respecter.
De ce fait, l'intérieur au final préservé me servira de bonne base d’apprêt.
Ainsi, la peinture intérieure est préservée.
- Pour en terminer avec cette phase de dégrossissage, je comble le méplat du toit avec un mastic de la marque allemande Simprop Electronic souvent
utilisé dans la maquette navale. À ma grande surprise, bien qu’assez liquide à l’emploi, celui-ci n’a rien à envier au bon vieux Sintofer des carrossiers ! Il a une très bonne capacité
d’adhérence (j’étais un peu inquiet à cet égard) et il présente, en plus, la
qualité d’avoir un grain très
Masticage du méplat avec du mastic rapide Modelbau, mieux que du Syntofer.
Après un premier ponçage, je complète les éventuelles microfissures et m’assure du bon galbe du toit, puis je ponce à nouveau.
Ponçage de la première couche au papier de verre.
B EXTERIEUR : Finitons
L’un de mes adages préférés ; « pourquoi faire simple lorsque l’on peut faire compliqué ?!!! » …. Je sens que vous commencez à cerner le personnage…
- Dans un premier temps, afin de rendre la scène un peu plus dynamique,j’entreprends de représenter mon autocar, avec 2 portes ouvertes (l’avant, droite plus celle de
l’arrière) A ce sujet, la version Alby représentait à l’avant une double porte pliante dans un espace renfoncé. J’aurais pu reproduire cette version, mais je n’en ai pas retrouvé sur les images
d’époque, je m’en suis donc tenu à une porte conventionnelle sur double charnières. Pour se faire donc, j’attaque la défonce facilitée par le caractère assez « souple » de ce métal blanc
À la perceuse à colonne tout d’abord. En utilisant un foret de 2mm et surtout en prenant soin de positionner une cale en bois à ’intérieur de la carrosserie pour éviter tout affaissement compromettant
Puis avec la même mèche montée sur la mini-perceuse afin de rejoindre les trous au maximum, ensuite avec la pince coupante d’électricien pour la porte avant.
Et un ensemble de petites limes* de diverses formes pour les 2 portes. (*limes utilisées pour confectionner les fers de toupies de menuiseries) , ainsi qu’un cutter à la lame neuve (eh oui !)
- À ce stade, je me rends compte d’une chose : L’encadrement des fenêtres est hyper basique et les couvres joints métalliques ne sont pas représentés en relief, il va donc falloir les faire ! Ils sont au nombre de 18 (comprenant les 2 du pare-brise avant), dont 12 latéraux de forme identique en rectangle aux bords arrondis. Qui dit reproduction multiple dit ? ……. Gabarit :
Le principe est donc simple, un gabarit en bois qui s’encastre parfaitement dans la fenêtre, de la tige de laiton en 0,7 mm facile à tordre, de la patience puis de la colle cyanoacrylate pour fixer chaque élément, et un léger ponçage à la lime pour les « désépaissir » un peu et casser l’arrondi de la tige. Pour les six autres (dont les parebrises) même protocole mais…… à main levée !
- Même chose pour les deux portes réalisées en carte plastique Evergreen.
Portes en carte plastique.
- Toujours suivant le même adage initial… Je m’inspire d’une ancienne maquette Roden 1/72 d’un Opel Blitz bus du DAK....
....... pour ajouter de façon aléatoire des plaques de protection aux fenêtres. Vous allez me dire : « Est-ce bien conforme, car rien ne le prouve, plutôt même le contraire… » Et je vous réponds
vous avez raison, parce que ces plaques avaient un objectif majeur : éviter la réflexion des vitres (en grand nombre dans un bus) au soleil du désert et donc rendre les véhicules « plus discrets
» aux yeux de l’aviation alliée. Mais les plaques offrent aussi l’avantage d’obscurcir l’intérieur du véhicule et l’ensemble des véhicules
sanitaires Français (voir photos) étaient des fourgons entièrement tolés et éclairés à l’intérieur pour la sécurité des « intervenions » médicales…….. Et parce que aussi cela faisait plus « joli
» veuillez accepter que je me sois permis cette petite « fantaisie » ! Techniquement, celles-ci ont donc été réalisées en plaque métallique pour photo découpe, complétées par les crochets
d’attache en profil Evergreen.
Plaque de fenêtre Découpe. Rajout des crochets Pose aléatoire
en métal d'attaches
-Les vitres des fenêtres non protégées seront traditionnellement réalisées à l’aide d’un Rhodoïd assez épais pour les pleines et d’un autre plus fin pour celles en partie abaissées. Bien entendu, celles-ci seront posées après peinture de la carrosserie.
- Pour finir sur les modifications extérieures, il a bien sûr été nécessaire de changer les roues du jouet par des modèles beaucoup plus réalistes......
Remplacement des roues.
..... Pour ce faire, j'ai utilisé de ma boîte à rabiot 2 jeux de roues de canon de 75 mm Schneider 1897 version armée Polonaise de la marque First to Figh.
- Normalement l’autocar était équipé de 2 roues jumelées à l’arrière. J’aurais pu les placer, mais cela m’aurait posé un problème d’aménagement intérieur. La carrosserie masquant les roues au 2/3, j’ai préféré opter pour une seule en creux » face boulonnée.
- Pour les roues avant, j’ai utilisé un jeu identique, mais en inversant logiquement le sens de pose côté « bombé ». De fait, j’ai dû inverser le boulon central et reproduire les autres à l’aide de profilé adéquat de la marque Evergreen.
Modifications roues avant.
C) EXTERIEUR : Mise en peinture.
- Après ponçage, positionnement d’une couche de laque d’apprêt de marque Tamiya gris léger intérieur comme extérieur.
- Puis vient le choix de la livrée. Comme dit lors de la présentation, les seuls exemples d’Isobloc sanitaires militaires sont des réalisations sous camouflage Allemand de véhicules réquisitionnés, sauf… Un réalisé au 1/43 par la marque EPM Productions et qui présente un modèle service sanitaire de l’armée Française en 1945.
Isobloc sanitaire France au 1/43ᵉ
- Je choisis donc la base « olive green » de chez Tamiya XF-58 (Photo 15c) en éclaircissant légèrement le centre des surfaces (toit, côtés, plaques de protection) avec des mélanges d’huiles vertes et jaunes. Je fixe le tout une fois sec avec une couche de vernis VMS Mat dilué à 50% avec le Thinner de la même marque.
Une seule couleur.
- Puis je me permets une « variante » en m’inspirant d’un autre véhicule que j’ai réalisé pour le même diorama, une White Laffly AMD 80 du 8e Rgt de Cuirassiers de Saint-Germain-en-Laye, avec son fameux camouflage " spaghetti".
Inspiration de camouflage.
Le « filet » jaune sera réalisé à main levée à l’aide d’un « Roller » de 0,7 mm de la marque Posca.
Et au final, le résultat sera le suivant :
- Je passe ensuite une couche de vernis brillant VMS Gloss, dilué à 50%
- Puis je pose mes décals tirés de ma boite à rabiot (essentiellement les croix rouges) et de la gamme Histopic France 1940 pour les immatriculations.
- Une nouvelle couche de vernis brillant pour fixer et fondre les décals.
- Et enfin une dernière couche de vernis mat.
- La dernière touche : rajout d’une paire d’essuie-glaces en photo découpe et gestion des phares avant
-*Gestion des phares avant :
Après avoir évidé l’intérieur des phares à l’aide de la mini perceuse, avec l’aide d’un pinceau, je place une mini goûte de jaune orangé au centre pour évoquer l’ampoule. Après séchage, je comble le trou par un vernis épais brillant Acrylique de la marque Van Bleisvijck (celui-ci s’utilise avantageusement pour la création de petites surfaces type flaques d’eau, petits étangs en lieu et place de résine). Enfin, je recouvre d’une peinture translucide jaune de la gamme Clear de chez Tamiya permettant de préserver la profondeur du phare de façon réaliste.
- Et voilà le travail !
Fin.
D) INTERIEUR : Pourquoi le détaillage
- Vous alliez me dire, si, si …… : « À quoi bon détailler un intérieur de maquette puisqu’il ne se verra pas ? » …. Et bien d’abord pour le simple plaisir de le faire ! Et parce que dans le cas présent, celui-ci pourra être facilement désolidarisé de sa carrosserie monobloc super solide (en forme de saucisse). Pour ce faire, il faudra bien entendu être très rigoureux sur la précision des assemblages et des jeux nécessaires ! Je rappelle aussi, que bien qu’à petite échelle, il y a beaucoup de fenêtres permettant d’apercevoir pas mal d’éléments du décor.
- Mais la question essentielle est : Quel intérieur adopter ? Surtout lorsque l’on ne trouve pas d’images précises concernant le véhicule ainsi équipé ?
- Une seule trouvaille au 1/72, encore une production Alby, avec finalement un intérieur de sièges traditionnels pour passagers, ce qui ne me semblait pas du tout conforme pour un véhicule ambulance notamment de cette taille.
- Cependant, mes recherches m’ont permis de trouver sur un site de la défense nationale (Images Défense, ECPAD) des vues d’intérieur de véhicules militaires sanitaires français de cette période. Ne sachant pas si ces images sont libres de droits, j’insère le lien dans l’article
Photos à retrouver ici :
https://imagesdefense.gouv.fr/fr/faq#question_image_2
- Celles-ci montrent clairement des installations plus sophistiquées permettant des interventions médicales dignes d’un véhicule sanitaire, même dans des espaces limités, où les premiers secours pourront être prodigués, et surtout où l’on trouvera……. des couchettes et/ou des brancards suspendus
E) INTÉRIEUR : le déroulé du détaillage
- l faut tout d’abord rassembler les matériaux qui nous seront utiles : boite à rabiot, outils (divers cutters et pinces, diverses colles pour tous matériaux, crayons…) , et surtout plaques et profilés Evergreen, feuilles de métal, fils de différents métaux et diamètres, tiges métalliques rigides…
Matériel pour scratching et boite à rabiots.