En attendant le dernier volet sur le triptyque des officiers


On représente toujours l’armée des Indes en lungi , Kurta et cummerband,  pour le plus grand plaisir des spectateurs, à tel point que c’est encore comme cela que l’Inde moderne perpétue ses traditions. Mais il serait totalement faux de s’imaginer que les officiers britanniques de l’époque du Raj passaient leurs 25 ou 30 ans de service dans les Indes déguisés en maharadjahs du matin au soir et tous les jours de la semaine. Loin s’en faut !

 

Comme on a vu précédemment, les diverses manières d’accommoder la mise en forme du lungi et des fioritures associées marquaient l’appartenance à une religion, une caste ou un clan et, La tenue traditionnelle indienne était bien sûr celle des troupes indiennes, recrutées sur place.

 

aussi bien pour la troupe que pour les officiers, étaient autant de moyens de se reconnaitre ( surtout entre eux). On peut penser qu’ils n’avaient d’autres tenues que celles de service (temps chaud, temps froid), celles de combat et celles de parade ; mais toutes autour du modèle local, avec les détails qui variaient. C’est ce qui a survécu à l’indépendance.

 

Ce qui n’empêche nullement des panachages plus ou moins heureux, sauf pour le bonheur des figurinistes actuels.

 


Mais les officiers britanniques obéissaient ( de bonne ou mauvaise grâce) aux règlements de la’’ nation mère ‘’ . Ils étaient britanniques victoriens , servaient la couronne victorienne et restaient britanniques avant et par-dessus tout. Les séjours outre-mer de cette époque étaient particulièrement long, et bon nombre d’officiers , bien que britanniques, n’ont foulé le sol de leur chère Angleterre, Irlande , Galles ou Ecosse que lorsque la retraite les a remis à disposition du dépôt de leur régiment. D’autres, né là-bas, ayant servi là-bas , y sont morts sans avoir connu le smog londonnien. Mais sur place, ils avaient vécu en ‘’anglais’’, au milieu d’’anglais’’, à l’heure ‘’anglaise’’, car il était impensable de considérer les indigènes, les ‘’natives’’ comme autre chose que des instruments utiles, dociles et parfois ‘’piquants’’.

 

 

Ces britanniques (au demeurant à majorité irlandaise et écossaise) ont donc porté plus souvent un uniforme d’inspiration ‘’métropolitaine’’ que locale. La tenue locale a fait d’ailleurs mauvaise impression en société jusqu’à la fin du XIXème siècle, en dehors des parades officielles ou le temps d’une prise d’arme et d’un défilé avec la troupe, où la grande tenue à l’indienne faisait vibrer le cœur des dames anglaises.

 

 

L’évolution des mentalités qui ont mené à l’indépendance a marqué trois temps principaux.

 

D’abord, les anglais sont les maitres, des demi dieux. Pas question de s’abaisser au niveau du cipaye. Un deuxième temps amène les officiers anglais à vivre au milieu et au rythme de leurs troupes à l’écart du commandement central pendant un long moment et il devient plus pratique de s’habiller comme les hommes. Le troisième temps , aux alentours de 1900, voit le prestige de la tenue indienne gagner le côté britannique de même que les officiers indigènes gagnent le droit de porter des insignes de grades à ‘’l’anglaise’’, ce qui n’existait pas avant, l’épaisseur des dorures et broderies en tenant lieu.

 

Au centre : debout , un jeune lieutenant en tenue complètement irrégulière et assis vers la droite le Fameux Hodson propriétaire de plusieurs régiments. Tous les deux portent le casque de liège (en sureau) mais aucun n’est en tenue réglementaire….

 

 

Il n’empêche que les troupes de cavalerie sont de deux origines majeures. Les ‘’vieux ‘’régiments issus de la compagnie des Indes et les régiments qui appartiennent à un personnage de la couronne royale. Les régiments les plus anciens sont reconnaissables à leur titre de ‘’Regiment of Horse’’ ou ‘’Horse Regiment’’, ou encore ‘’cavalry Regiment’’. Ce titre est souvent associé au nom de l’officier ou de la province qui les a levé. Exemple : Hodson’s Horse, Probyn’s Horse pour des personnages , ou Scinde’s Horse, Deccan’s Horse pour des régions. Ces régiments appartiennent en plein à la cavalerie et , en dehors de la tenue indienne , portent l’uniforme des hussards ou de la cavalerie ordinaire.

 


cette vue montre un officier indigène en tenue de parade, et deux britanniques. L’un en tenue à la hussarde et l’autre en pantalon en tenue de lanciers.

 

l’officier de droite illustre bien les interprétations possibles sur les tenues.


D’autres régiments, souvent issus de la Grande Mutinerie de 1857, se disent ‘’Lancers’’ et en portent donc les tenues

Pour les gardes du gouverneur général, il est intéressante de noter la forte influence britannique sur la coupe du kurta en tenue indienne alors que le britannique n'a rien retenu d’indien

Officiers des 21th Lancers ( Impresse of India) et 17th Lancers ( victory or death) en service tous deux en Inde

 


Tout ceci se complique lorsqu’on apprend qu’à l’intérieur d’un même régiment, les nombreuses tenues obéissent à des actes de service de la journée et à un horaire rigide. A savoir :

 

 

 

 

Quelle que soit la saison, le ‘’frock coat’’ est le seul vêtement toléré en dehors des bâtiments, quelle que soit la raison d’être en extérieur. Il en va de même pour le service à partir de 16heures. C’est pourquoi l’officier en charge de la ‘’dismounting parade’’ ( parade de fin de garde montée à cheval) ne parait dans la cour qu’à cette heure avec la cloche, et vêtu comme cela.

 

Le midi :

 

 

Les officiers retenus par le service avec la troupe peuvent être vêtus à l’indienne en dehors du camp, mais pas à l’intérieur. Il en va de même pour ceux qui ne sont pas de service. Les autres sont en ‘’stable jacket’’

 

L’après midi :

 

 

Toutes les tenues sont tolérées en fonction des différents services. Pour le service extérieur au camps, le patrol jacket remporte un franc succès.

 

C’est un vêtement français à l’origine , inspiré de tenues d’Europe centrale qui a connu un grand succès jusque pendant la première guerre mondiale.

 

Le soir :

 

 

La tenue de mess s’impose pour ceux qui ne sont pas de service , avec le ‘’mess coat’’ sous lequel on aperçoit le waist jacket.

 


 

 

 

 

 

 

 

 

Tenue d'après-midi  ajustée mais ample, pratique, résistante et qui peut s’adapter à toutes les circonstances. Ici, avec les guides du Nord Ouest .

 

 


 

 

 

Lors de dîner officiel, le pill box (boîte à pilule) est de rigueur et doit rester sur la tête, alors qu'en dehors de ces occasions, le "folding cap", qui peut être mis à plat et ne reste pas sur la tête, lui est préféré

 

 

 

 

 

Le terme pour cette coiffure est devenu ‘’side cap’’ car elle a été rendue célèbre pendant les deux guerres en étant portée exagérément portée penchée sur le côté droit presque sur l’oreille

 

 

Bien sûr, il reste de nombreux particularismes et surtout exceptions ( l’armée britannique ne serait pas sans cela …) . J’ai choisi de nombreuses gravures montrant des détails d’uniformes de hussards, parce qu’on les retrouve dans de nombreuses tenues de l’armée des Indes, même parmi les lanciers, mais aussi pour la précision de l’iconographie.

 

Et je remercie Jean Claude Colrat pour avoir pu utiliser quelques clichés du numéro spécial du bulletin du Briquet sur la cavalerie des Indes.

 

 

 

Je ne pouvais clore cet article sans quelques clichés d’un officier du 30th Lancers en casque à pointe, que j’avais réalisé il y a quelques années.

 


Place à nouveau à la célébrité du costume à l’indienne avec la troisième et dernière figurine du tryptique, en cours de réalisation.

A suivre......

 

 

                                                                                                                                             Article de Philippe Barreaud


                                                                                                              Texte et documentations: Philippe Barreaud

                                                                                                                                           Mise en page: Alain Barniaud